Journal d'un corps :
impérissable roman
d'un corps masculin

Un roman de Daniel Pennac qui, à l'instar de son corps, ne vieillit pas : de son adolescence à sa mort, le narrateur tient le journal de son corps. Nous connaissons tous la solitude éprouvée à l'égard de notre propre corps, et ce récit nous dévoile que nous partageons tous cette incompréhension. Ce que nul n'exprime est pourtant là, rythmant nos vies et nous amusant quelques fois.

Par San Makar

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Journal d'un corps : impérissable roman d'un corps masculin

"13 ans, 1 mois, 8 jours. Mercredi 18 novembre 1936
Je veux écrire le journal de mon corps parce que tout le monde parle d'autre chose."

En 2012, la France découvrait l'idée originale de Daniel Pennac de narrer le journal d'un corps, un récit intime dans lequel ce n'est pas la routine qui est racontée mais les bouleversements de l'enveloppe charnelle qui traverse l'existence. Comme dans n'importe quel roman, et même plus que dans n'importe quelle histoire, on s'y confronte aux changements aux sensations. Il y a une déconstruction du mythe de la masculinité par le corps fort et l'âge adulte, comme le démontre d'ailleurs une revue d'ethnologie française du CAIRN.

50 ans et 3 mois. Jeudi 10 janvier 1974
Si je devais rendre ce journal public, je le destinerais d'abord aux femmes. En retour, j'aimerais lire le journal qu'une femme aurait tenu de son corps. Histoire de lever un coin de mystère. En quoi consiste le mystère ? En ceci par exemple qu'un homme ignore tout de ce que ressent une femme quant au volume et au poids de ses seins, et que les femmes ne savent rien de ce que ressentent les hommes quant à l'encombrement de leur sexe."

On y retrouve un homme, ses peurs et ses faiblesses. En dépit d'une enfance complexe marquée par la disparition de proches et accentué par le désamour d'une mère, il a tout de même su tirer de son entourage quelques conseils qui l'ont poussé à entreprendre et à "réussir sa vie". Vaincre ses doutes, aller vers la femme, pour connaître son corps malgré l'incompréhension du sien, c'est l'un des grands enjeux de la première partie du récit.

"86 ans, 9 mois, 16 jours. Lundi 26 juillet 2010
Nous sommes jusqu'au bout l'enfant de notre corps. Un enfant déconcerté."

L'oeuvre est riche et exhaustive, elle s'affranchit même de la pudeur. En revanche, cette mise nue n’est pas le fruit d'une écriture simple mais touchante et maladroite. C'est une démonstration, celle de la nécessité du partage des ressentis et de l'ouverture dans les rapports humains. Sur plusieurs années et même toute une vie, une prise de recul est opérée pour assister à la vie du narrateur de sa globalité, au temps qui s'écoule, au corps qui change de même que l'environnement. Des questions cruciales sont soulevées, et surtout la suivante : quelle est la place du corps dans une société en continuelle évolution ?

Original, bouleversant, intéressant.

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