OSS117 : la blanquette
est toujours bonne ?

Débarqué le 4 août dernier dans les salles, le troisième opus des aventures "du meilleur agent français" était la sortie la plus attendue de l'été. Top ou flop ? San Bens donne son avis sur ce qui parait être un stéréotype d'une masculinité bien définie.

Par San Bens

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OSS117 : la blanquette est toujours bonne ?

Attente et impatience sont bien souvent mères de déception. Une règle qui se confirme particulièrement en matière de cinéma. Les exemples de franchises qui se seraient bien passées de leur dernier opus sont légion. En France, les ultimes volets de sagas comme Les bronzés, La Vérité si je mens ou encore Camping, ne sont que des preuves parmi d'autres que ressortir un dernier épisode d’un succès vieux de dix ans est un pari trop risqué. C’est un peu comme un amour de jeunesse : on essaye de se replonger dans les souvenirs d'antan, mais tout a un goût de réchauffé. La magie n’opère plus…

C’est donc avec une certaine anxiété que je me suis rendu en salle pour voir les dernières aventures du héros le plus “cocasse” de mon adolescence : Hubert Bonisseur de La Bath. Vais-je retrouver la finesse comique qui a propulsé les films du meilleur agent français dans mon panthéon cinématographique ? Ce troisième volet, peut-il garder cet humour provocateur, si efficace à l’heure du politiquement correct ?

En sortant du cinéma, j'ai finalement poussé un ouf de soulagement. Certes, Alerte rouge en Afrique noire n’est pas le plus grand des OSS177, mais Nicolas Bedos - sans se hisser au niveau d’Hazanavicius (réalisateur des deux premier opus de la saga) - sauve l’éssentiel. Même vieilli, ce "sacré Youberte" conserve son charme et son franc-parler irrésistible. Jean Dujardin n’a absolument aucun mal à se glisser une nouvelle fois dans son “smoking en alpaga”. En face de lui, c’est un Pierre Niney plutôt solide qui campe le rôle de l'insupportable OSS1001, ou plus simplement : Serge.

Un coup de vieux Hubert ?

Après l’avoir quitté au sommet du Corcovado en 1967, on retrouve notre Hubert national, quatorze ans plus tard. Dans une France Giscardienne qui vit ses derniers instants, ce cher de la Bath est resté le même. Franchouillard jusqu’au bout des ongles, OSS117 incarne cet oncle bourré de préjugés sur les femmes et les minorités, mais tellement attachant.

"Même le temps joue sur le meilleur agent français qui n’a plus que la France et le général pour lui donner la gaule."

Sauf que Hubert, nous ne sommes plus dans "la France du général de Gaulle”. Face à une femme qui t’explique que “l’idée, c’est de travailler d’égal à égal”, tu ne peux plus lui répondre “On verra quand il faudra porter quelque chose de lourd.” Tu ne peux plus te comporter en pays conquis dans les anciennes colonies même si tu penses que “c’est encore un peu la France". Hubert ne se rend pas compte qu’il est dépassé, et qu'il s'agit d'un stéréotype d'une masculinité révolue. Même le temps joue sur le meilleur agent français qui n’a plus que la France et le général pour lui donner la gaule. Le pauvre 117 se fait ringardisé par ce jeune Serge, prototype d’une société qui s’apprête à porter Mitterrand et son programme commun au pouvoir.

C’est vrai que voir bander mou celui “qui est une aventure” quand “d’aucuns ont des aventures” est un peu pathétique. Mais le choix de faire tomber de son piédestal “la légende” à cette avantage de nous rappeler que rien n’est éternel et nous permet de nous moquer encore un peu plus de lui. D'autant que Dujardin n’a rien perdu du pouvoir comique de son personnage. Si les moments cultes seront sans doute moins nombreux que dans les volets précédents, Alerte rouge en Afrique noire nous offre quelques moments de grâce qui resteront, j’en suis sûr, gravé dans les annales.

N’est pas Hazanavicius qui veut

Le changement de réalisateur dans une saga est toujours un moment délicat. Que les fans se rassurent, Nicolas Bedos fait le job... Mais pas plus !

Oui, le cahier des charges est respecté, on retrouve les recettes qui ont fait le succès d’OSS117, mais je ne peux m'empêcher d’être un peu déçu. Bedos nous avait promis la “liberté de l’humour”. Sa réputation anticonformiste me faisait espérer une liberté de ton qui serait idéale pour ce film... Mais le réalisateur n’arrive pas à imposer sa patte.

"Malgré l'interprétation parfaite de Pierre Niney, je ne vois toujours pas la réelle valeur ajoutée d’OSS1001 dans l’intrigue."

Alerte rouge en Afrique noire nous sert un Hubert qui tente d’être plus ouvert d’esprit mais qui, en définitive, n’y parvient pas. Certes, frustrer l'esprit réac de l’agent secret est le sens de l’histoire, mais je n’ai vraiment pas été convaincu par cette option un peu tiédas. Brimer totalement les saillies racistes du héros aurait été une stratégie risquée, mais peut-être plus drôle. Imaginer la tête de ce pauvre Hubert, condamné à retenir toutes les saletés qu’il pense. Au contraire, assumer pleinement le caractère dépassé du personnage aurait pu créer un effet comique dévastateur. Un choix qui aurait eu le mérite de donner plus de relief au personnage de Serge.

On arrive là à la principale pierre dans le jardin de Nicolas Bedos. Malgré l'interprétation parfaite de Pierre Niney, je ne vois toujours pas la réelle valeur ajoutée d’OSS1001 dans l’intrigue. Pourtant, décider de remplacer la traditionnelle coéquipière d’OSS117 - principal vaisseau des vannes des deux premiers opus. - par un jeune espoir de l'espionnage était un pari intéressant. Mais le duo n’a jamais réussi a transformer le décalage entre les deux espions en situation réellement comique.

Avec ses forces et ses faiblesses, OSS117 reste un bon film. Il ne rejoindra pas ses grands frères au rang de chefs d'œuvre de la comédie française, mais je conseille tout de même de le visionner. Peut-être qu’à la fin de la projection, tu te diras, toi aussi : "en effet, c’est cocasse.”

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